Séminaire
Espaces et Bandes Dessinées
La ville est un objet complexe dont la bande dessinée se saisit volontiers à la fois comme lieu où ses récits peuvent se déployer et comme véritable outil de se déploiement. Autrement dit, la ville est un décor-actant qui participe pleinement à la mise en récit de la bande dessinée. Il en va de même, plus globalement, avec l’espace géographique. Reste à savoir comment elle oriente, construit, voire conduit le récit sur quelques exemples précis de la BD franco-belge d’hier et d’aujourd’hui.
Le séminaire accueillera deux interventions :
- 9h30 : intervention de Raphaël Baroni intitulée « La dimension architecturale de la bande dessinée : vers une nouvelle typologie des mises en page »
- 11h : intervention de Pascal Robert intitulée « La ville, l’Un et le multiple, Les figures du politique dans l’Incal de Jodorowsky et Moebius »
Les deux interventions sont présentées plus bas sur cette page.
Mots-clefs : Espaces, bandes dessinées, territoires
Invité.e.s
Pascal Robert est professeur des universités à l’Enssib et membre du laboratoire Elico. Ses travaux visent à décrypter les enjeux politiques et cognitifs de l’informatisation de la société et à l’élaboration d’une anthropologie du document et des images (et notamment la bande dessinée). Il a dirigé Bande dessinée et numérique (CNRS, 2016) et tout récemment La ville en Planches (Hermann 2021). Il a publié De l’incommunication au miroir de la bande dessinée (PUBP 2017) et en 2018 La bande dessinée, une intelligence subversive (aux Presses de l’Enssib). Il est responsable du séminaire de l’Enssib « La bande dessinée en questions ».
Raphaël Baroni est professeur associé à l’Université de Lausanne. Il a publié La tension narrative (Seuil, 2007), L’œuvre du temps (Seuil, 2009) et Les rouages de l’intrigue (Slatkine, 2017). Il est cofondateur du Groupe d’étude sur la bande dessinée (GrEBD: https://wp.unil.ch/grebd) et du Pôle de narratologie transmédiale (NaTrans : https://wp.unil.ch/narratologie/natrans/). Il préside actuellement l’Association internationale des chercheurs en littératures populaires et culture médiatique (LPCM: https://lpcm.hypotheses.org/) et dirige un projet de recherche financé par le FNS sur les reconfigurations de la bande dessinée francophone à l’ère numérique (https://p3.snf.ch/project-180359#)
Résumé
La ville, l’Un et le multiple, Les figures du politique dans l’Incal de Jodorowsky et Moebius (Pascal ROBERT)
L’Incal, de Jodorowsky et Moebius (5 tomes, les Humanoïdes associés), est habité et travaillé par une tension entre l’Un et le Multiple. Nous reprenons à notre compte une vieille dichotomie proposée implicitement au XVI°s par Etienne de la Boétie dans son De la servitude volontaire, appelé également par certains Contre l’Un. Ainsi, alors que l’on serait tenté, peut-être, de privilégier une entrée par le mysticisme pour aborder ce chef-d’œuvre de la bande dessinée de science-fiction franco-belge, nous voudrions montrer qu’elle peut tout autant faire l’objet d’une interprétation politique. Et la ville n’est pas neutre en l’affaire, dès lors que, polis, elle est le lieu même, aux yeux des grecs anciens en tout cas, où s’exerce de plein droit la raison politique ou sa déraison parfois. Nous allons donc tout d’abord revenir sur cette présence de la ville dans l’Incal, car, à l’instar d’une porte, elle ouvre et ferme l’œuvre. Puis, nous déclinerons les trois figures du politique, expression de la tension entre l’Un et le multiple : Le Multiple contre l’Un (la révolution et l’invasion), L’Un est le Multiple (le totalitarisme), de l’Un, qui devient le Multiple, à l’Un qui renoue le multiple avec lui-même (La religion).
La dimension architecturale de la bande dessinée : vers une nouvelle typologie des mises en page (Raphaël BARONI)
Dans cette présentation, je reviendrai sur l’une des propriétés les plus fascinantes de la bande dessinée, à savoir la manière dont elle projette la séquence de son discours (souvent un récit) dans l’espace de son support graphique. Cette propriété du médium met l’accent sur la dimension scripturale de la lecture et invite à s’interroger sur les différentes manières d’occuper cet espace, voire de l’architecturer, de manière à produire des effets fondés sur la tabularité du message. En proposant une nouvelle typologie des mises en page, je proposerai de reconnaître l’importance de cette dimension architecturale, qui est susceptible de se manifester dans des configurations très diverses, de la mise en page régulière que l’on associe au « gaufrier » jusque dans les compositions les plus irrégulières ou « rhétoriques ». On évoquera également les défis posés par la transition numérique de la bande dessinée en rapport avec la tabularité de ce médium traditionnellement associé à des supports imprimés : presse, comic book, magazine, album ou roman graphique.
Baroni, R. et al. (dir.) (2022), « Enseigner la bande dessinée à l’Université : regards croisés sur Le Long Voyage de Léna d’André Juillard et Pierre Christin », Transpositio, n° 5. URL : https://www.transpositio.org
Baroni, R. & G. Turin (dir.) (2021), « Enseigner la bande dessinée comme (de la) littérature », Transpositio, n° 4. URL : https://www.transpositio.org/categories/view/n-4-enseigner-la-bande-dessinee-comme-de-la-litterature
Baroni, R., G. Kovaliv & O. Stucky (2021) « La transition numérique de la bande dessinée. Une mutation impossible ? », Belphégor, n° 19 (2). DOI : https://doi.org/10.4000/belphegor.3948
Baroni, R. (2021) « Apprendre la dimension scripturale de la lecture avec la bande dessinée », Lettre de l’AIRDF, n° 68, p. 49-54. URL : https://www.persee.fr/collection/airdf
Baroni, R. (2021) « Of Mice as Men: A Transmedial Perspective on Fictionality », Narrative, n° 29 (1), p. 91-113. DOI : https://doi.org/1353/nar.2021.0004
Baroni, R. & R. Oesterlé (2020) « RAW : la fin de la puberté pour la bande dessinée américaine », Études de Lettres, n° 312, p. 201-204. DOI : https://doi.org/10.4000/edl.2442
Baroni, R. (2020) « Suspense » in Le Bouquin de la bande dessinée. Dictionnaire esthétique et thématique, T. Groensteen (dir.), Paris, Robert Laffont, p. 769-773.
Baroni, R. (2018) « Le chapitrage dans le roman graphique américain et la bande dessinée européenne : une segmentation précaire », Cahiers de narratologie, n° 34.
URL : http://journals.openedition.org/narratologie/8594
Baroni, R. (2017) « En bande dessinée, le temps, c’est de l’espace… », Fabula / Les colloques, L’art, machine à voyager dans le temps. URL : http://www.fabula.org/colloques/document4785.php
Baroni, R. (2016) « (Un)natural Temporalities in Comics », European Comic Art, n° 9 (1), p. 5-23.
URL : http://www.berghahnjournals.com/view/journals/eca/9/1/eca090102.xml
Baroni, R. (2015) « L’exploration temporelle comme modalité du voyage imaginaire dans la bande dessinée franco-belge (1930-1980) », Image [&] Narrative, n° 16 (2), p. 96-113.
URL : http://www.imageandnarrative.be/index.php/imagenarrative/article/view/864
Date et lieu
1 avril 2022 / 9h30-12h30
Enssib (Amphithéâtre - RDC)